Mr Soderman responds to Mr Prodi's letter to the President of the European Parliament

Topic
Country/Region
EU

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[English below]

Strasbourg, le 14 mars 2000

Madame Nicole Fontaine

Présidente

Parlement européen

Rue Wiertz

B - 1047 Bruxelles

Madame la Présidente,

Le Président de la Commission européenne m'a envoyé une copie de la lettre qu'il vous a adressée le 3 mars 2000. Dans sa lettre, Monsieur Prodi se réfère à un article publié le 24 février 2000 dans le Wall Street Journal, dans lequel j'ai critiqué la proposition de Règlement de la Commission relatif à l'accès du public aux documents. Cet article relate des vues que j'ai également exprimées publiquement dans mon allocution du 2 février 2000 devant l'enceinte chargée de la rédaction d'une Charte des Droits Fondamentaux pour l'Union européenne. M. Prodi a publié une réponse à mes vues dans le Wall Street Journal du 8 mars 2000.

Je crois que ce débat a bénéficié aux citoyens européens et non pour la seule raison qu'il a offert à M. Prodi l'occasion de promettre que la transparence deviendrait le mot d'ordre de son mandat en tant que Président de la Commission.

Je crois également qu'il était juste de conduire ce débat publiquement, notamment parce que la Commission n'a pu tenir sa promesse de publier un document consultatif avant de finaliser sa proposition de Règlement relatif à l'accès du public aux documents.

En analysant la lettre de Monsieur Prodi, il est important de se rappeler que la plupart des plaintes relevant du mandat du Médiateur européen concernent la Commission européenne et que le manque de transparence a été l'un des objets principaux des plaintes contre la Commission européenne au cours des années passées.

Lors de son examen des quatre rapports annuels que j'ai présentés à ce jour, le Parlement européen a pris en considération et approuvé mon travail en tant que Médiateur. A l'occasion de ces quatre présentations, le Membre responsable de la Commission m'a félicité pour la manière dont j'ai mené à bien mes tâches et s'est félicité de l'atmosphère de bonne coopération entre les institutions communautaires et le Médiateur.

Si l'intention de la lettre de Monsieur Prodi est de restreindre le droit du Médiateur européen à participer au débat public sur des questions qui intéressent les citoyens européens, il s'avère utile de rappeler que j'ai prêté le serment d'exercer mes fonctions en toute indépendance dans l'intérêt général des Communautés et des citoyens de l'Union. Le Statut du Médiateur m'interdit d'accepter des instructions d'aucun gouvernement ou organisme, y compris la Commission européenne.

Selon le Traité sur l'Union européenne, l'Union respecte les principes de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, y compris la liberté d'expression. Je puis vous assurer qu'aucune pression injustifiée ne me fera abandonner l'exercice de ce droit pour la défense des intérêts des Communautés et des citoyens de l'Union.

Monsieur Prodi croit, à juste titre, qu'une bonne loi sur l'accès du public aux documents profiterait à la fois aux institutions communautaires et aux citoyens européens et améliorerait leurs relations. J'ai consacré une grande partie de ma carrière professionnelle à des questions liées aux lois sur l'accès du public aux documents et aux plaintes concernant le refus à cet accès. Je demeure persuadé que les citoyens européens sont en droit d'attendre une meilleure loi que celle qu'a proposée la Commission.

Dans un esprit de coopération loyale, je joins à la présente, une note contenant les points auxquels un changement devrait être apporté à la proposition de la Commission, dans le souci de donner effet aux bonnes intentions de Monsieur Prodi et pour que l'accès des citoyens européens aux documents soit mis en œuvre conformément au Traité d'Amsterdam.

Je me tiens à l'entière disposition du Parlement européen et de ses commissions et serais disposé, notamment, à suggérer des projets d'amendements si cela pouvait vous être utile dans la procédure d'examen de la proposition de Règlement de la Commission.

Veuillez agréer, Madame la Présidente, l'expression de ma considération distinguée.

 

Jacob SÖDERMAN

cc : Présidence du Conseil

M. Prodi

 

Note sur les changements principaux qui devraient être apportés à la proposition de Règlement de la Commission relatif à l'accès aux documents

1 créer des droits et non des pouvoirs discrétionnaires

L'Article premier du projet de Règlement prévoit que les citoyens aient "le droit d'accès le plus large possible" aux documents des institutions (mis en exergue par le Médiateur).

Cependant, des parties-clés du Règlement telles que les exclusions de la définition de "document" et les exceptions à l'accès, sont rédigées en termes inutilement généraux.

Ceci implique que la mise en œuvre du Règlement comprendrait l'exercice d'un large pouvoir de discrétion de la part des institutions. En pratique, les citoyens ne jouiraient, par conséquent, pas de droits mais seraient dépendants de la bonne volonté de fonctionnaires exerçant les pouvoirs discrétionnaires au nom de l'institution.

2 Éviter d'induire en erreur le citoyen

Il semble évident que l'intention du projet de Règlement de la Commission est d'empêcher les États Membres de donner accès, en vertu de leurs propres législations, à des documents que le citoyen ne pourrait obtenir d'une institution communautaire. La première clause du point 12 des considérants(1) pourrait être mal comprise et interprétée à l'opposé et devrait par conséquent être modifiée ou supprimée.

3 Énumérer dans le Règlement toutes les lois existantes sur le secret

L'article 2 paragraphe 2, second alinéa stipule : "Le présent règlement ne s'applique pas dans la mesure où il existe des règles spécifiques contenant des règles en matière d'accès aux documents". Cela signifie, entre autres, que toutes les lois spéciales existantes et permettant le secret seront toujours en vigueur. La nécessité de cette mention n'est pas claire. La liste des lois en question devrait tout du moins figurer en annexe, sinon les citoyens ne sont pas en mesure de connaître leurs droits.

4 Inclure tous les documents dans le Règlement

Le Règlement définit le terme "document" de façon à inclure des documents produits par des tiers. La note explicative de la Commission affirme que cette extension représente un grand pas en avant par rapport au système actuel qui ne couvre que les documents produits par les institutions.

Les citoyens qui lisent la note explicative risquent d'être déçus, car l'Article 4 du Règlement contient une exception pour :

"la protection de la confidentialité demandée par le tiers qui a fourni le document ou l'information..."

Cela semble signifier que n'importe qui a le droit d'envoyer un document à une institution communautaire en demandant qu'il soit tenu secret, sans en donner les raisons.

La proposition de Règlement devrait limiter le droit des tiers à soumettre des documents "confidentiels" aux cas qui ressortent de justifications prévues par la loi, tel que la confidentialité en matière commerciale. Dans le cas contraire, tous les documents de tiers qu'un citoyen risque de demander à consulter pourraient être exclus en pratique.

5 Inclure le droit d'accès aux documents pertinents

L'Article 3 contient une exclusion très large de la définition de document :

"les textes à usage interne tels que les documents de réflexion ou de discussion, les avis des services, ainsi que des messages informels"

Pris littéralement, cela signifierait que les citoyens ne pourraient jamais même demander l'accès aux documents sur lesquels une institution a basé sa décision ou sa conclusion sur une question donnée. Quoique les institutions aient besoin "d'espace pour réfléchir", les résultats pertinents de leur réflexion devraient être disponibles publiquement, tout au moins lorsqu'une décision finale est prise.

6 Supprimer les exceptions inutiles

La liste des exceptions énumérées dans l'Article 4 est plus restrictive que le code de conduite existant. L'Article est également rédigé en termes inutilement généraux, par exemple, dans le cas de la nouvelle exception pour "les relations entre et/ou avec les États membres ou les institutions et organes communautaires et non-communautaires".

Deux des catégories de "l'intérêt public" devraient être supprimées :

(i) le déroulement des procédures d'infraction, y compris les étapes préparatoires

La nouvelle exception pour les procédures d'infraction semble avoir pour intention de renforcer le secret entourant la Commission dans son rôle de "Gardienne des Traités", qu'un récent arrêt de la Cour de Première Instance a déclaré "non-absolu" en vertu des règles existantes(2).

Le caractère secret des procédures de la Commission a été critiqué par de nombreux citoyens, en particulier ceux qui se sont plaints à la Commission de violation du droit communautaire par les États Membres. Ces procédures devraient être plus transparentes, et non pas moins.

(ii) les délibérations et le fonctionnement efficace des institutions

L'ajout de cette exception comme une nouvelle catégorie d'intérêt public semble avoir pour intention d'abolir la règle, établie par la Cour, qui prévoit qu'une institution doit trouver un équilibre entre ses intérêts dans la confidentialité de ses procédures et l'intérêt de la personne demandant la divulgation du document.

Dans tous les cas, l'exception dans l'intérêt de l'institution à la confidentialité des procédures semble inutile et pourrait être supprimée.

7 Chaque institution devrait avoir un registre central de documents

L'Article 9 prévoit que toute institution rende accessible "un registre de documents". Cependant, il n'est donnée aucune définition du terme "registre", ni aucune indication de ce qu'il devrait contenir. Il n'y a notamment aucune obligation pour chaque institution de tenir et de publier un registre central qui comprenne tous les documents entrants et sortants. Il faudrait également clarifier le fait que le registre doive contenir également les documents confidentiels, sous une forme qui ne divulgue pas les informations confidentielles.

Footnote 1: "Même si le présent réglement n'a ni pour objet ni pour effet de modifier les législations nationales applicables en matière d'accès aux documents, il va de soi qu'en vertu du principe de loyauté régissant les rapports entre les institutions communautaires et les Etats membres, ces derniers veilleront à ne pas porter atteinte à la bonne application du présent réglement."

Footnote 2: Affaire T-309/97, Bavarian Lager c Commission, arrêt du 14 octobre 1999, paragraphe 41 : "Toutefois et contrairement à ce qu'affirme la Commission, il ne résulte pas de la jurisprudence, et notamment de l'arrêt WWF, que tous les documents liés aux procédures en manquement soient couverts par l'exception tirée de la protection de l'intérêt public. [...]"

 

English version of French original

Strasbourg, 14 March 2000

Mme Nicole Fontaine

President

European Parliament

Rue Wiertz

B - 1047 Brussels

Madame President

The President of the European Commission has sent me a copy of his letter to you dated 3 March 2000. Mr Prodi refers to an article published on 24 February 2000 in the Wall Street Journal, in which I criticised the Commission's draft Regulation on public access to documents. This article repeats views first expressed publicly in my speech on 2 February 2000 to the Convention drafting the Charter of Fundamental Rights for the European Union. Mr Prodi published a reply to my views in the Wall Street Journal on 8 March 2000.

I believe that this debate has been to the benefit of the European citizens, not least because it gave Mr Prodi the opportunity to promise that transparency will become a byword of his mandate as President of the Commission.

I also believe that it was right to conduct the debate in public, especially since the Commission was unable to fulfil its promise to publish a consultation paper before finalising its draft Regulation on public access to documents.

In considering Mr Prodi's letter, you should remember that most of the complaints which are within the mandate of the European Ombudsman concern the European Commission and that one of the main reasons for complaint to the Ombudsman over the years has been a lack of transparency of the Commission.

In dealing with the four annual reports which I have presented so far, the European Parliament has considered and approved the record of my work as Ombudsman. On all four occasions, the responsible Commissioner has congratulated me on the way I have carried out my tasks and welcomed the atmosphere of good co-operation between the Community institutions and the Ombudsman.

If the intention of Mr Prodi's letter is to restrict the European Ombudsman's right to take part in public debate on issues of concern to European citizens, it should be underlined that I have sworn to perform my duties with complete independence, in the general interest of the Communities and of the citizens of the Union. The Statute of the Ombudsman forbids me to accept instructions from any government or other body, including the European Commission.

According to the Treaty on European Union, the Union shall respect the principles enshrined in the European Convention on Human Rights and Fundamental Freedoms, including freedom of speech. I assure you that no undue pressure will make me give up the exercise of that right in defence of the interests of the Communities and of European citizens.

Mr Prodi rightly believes that a good law on public access to documents would benefit the Community institutions as well as European citizens and enhance relations between them. A large part of my professional life has involved dealing with laws on public access to documents and complaints about refusal of access. I remain convinced that European citizens are entitled to a better law than the one which the Commission has proposed.

In a spirit of sincere co-operation, therefore, I enclose a note of the main points at which changes should be made to the Commission's draft, in order to give effect to Mr Prodi's good intentions and implement properly the European citizens' right of access to documents under the Treaty of Amsterdam.

I remain entirely at the disposal of the European Parliament and its committees. In particular, I would be ready to suggest draft amendments if this could be helpful to you in your dealings with the Commission's draft Regulation.

Yours sincerely

Jacob Söderman

Enclosure

cc Council Presidency

Mr Prodi

Note of the main changes which should be made to the Commission's draft Regulation on access to documents

1 Create rights not discretion

Article 1 of the draft Regulation states that citizens shall have "the right to the widest possible access" to the documents of the institutions (Ombudsman's emphasis).

However, key parts of the Regulation such as the exclusions from the definition of "document" and the exceptions to access, are drafted in unnecessarily general terms.

This means that application of the Regulation would involve the exercise of a large amount of discretion by the institutions. In practice, therefore, citizens would not so much enjoy rights as be dependent on the goodwill of officials exercising the discretion on behalf of the institution.

2 Avoid misleading the citizen

It seems obvious that the intention of the Commission's draft Regulation is to prevent Member States from giving access under their own laws to documents which the citizen could not obtain from a Community institution. The first clause of recital 12(1) could be misunderstood as saying the opposite and should therefore be amended or deleted.

3 List all the existing laws on secrecy in the Regulation

Article 2 (2) second indent states : "This Regulation shall not apply where specific rules on access to documents exist". This means, amongst other things, that all the existing special laws allowing secrecy will continue to apply. It is not clear why this is necessary. At least the relevant laws should be listed in an annexe, otherwise the citizens cannot know their rights.

4 Include all documents in the Regulation

The Regulation defines "document" so as to include documents produced by third parties. The Commission's explanatory memorandum says that this is a major step forward compared to the current system, which only covers documents produced by the institutions.

Citizens who read the explanatory memorandum could be in for a disappointment, because Article 4 of the Regulation contains an exception for:

"the protection of confidentiality as requested by the third party that supplied the document or the information …".

This appears to mean that anybody has the right to send a document to a Community institution in secret, without giving any reason.

The draft Regulation should limit the right of third parties to submit documents in confidence to cases which fall under grounds set out in law, such as commercial confidentiality. Otherwise all the third party documents which a citizen is likely to want to read might be excluded in practice.

5 Include a right to see supporting documents

Article 3 contains the following very broad exclusion from the definition of document:

"texts for internal use such as discussion documents, opinions of departments and informal messages".

Taken literally, this would mean that citizens could be permanently barred from even requesting access to the documents on which an institution has based its decision or conclusion on the matter concerned. Whilst the institutions need "space to think", the relevant results of their thinking should be publicly available, at least when a final decision has been made.

6 Delete unnecessary exceptions

The list of exceptions contained in Article 4 is more restrictive than the existing Code of Conduct. It is also drafted in unnecessarily broad terms as, for example, in the case of the new exception for "relations between and/or with the Member States or Community and non-Community institution".

Two of the categories of "public interest" should be deleted:

(i) infringement proceedings, including the preparatory stages thereof

The new exception for infringement proceedings appears to be intended to re-inforce the secrecy surrounding the Commission's role as the "Guardian of the Treaty", which a recent judgement of the Court of First Instance has indicated is not absolute under the existing rules.(2)

The secretiveness of the Commission's procedures has been criticised by many citizens, especially those who have complained to the Commission about infringements of Community law by a Member State. These procedures should be made more transparent, not less.

(ii) The deliberations and effective functioning of the institutions

The inclusion of this exception as a new category of public interest seems to be intended to abolish the rule, established by the Courts, that an institution must strike a balance between its interest in the confidentiality of its proceedings and the applicant's interest in disclosure of the document.

In any event, the exception for the institution's interest in the confidentiality of proceedings seems unnecessary and could be deleted.

7 Each institution should have a central register of documents

Article 9 requires each institution to provide "access to a register of documents" However, there is no definition of the term register, nor any indication of what it should contain. In particular, there is no obligation for each institution to maintain and publish a central register which includes all incoming and outgoing documents. It should also be made clear that the register must also include confidential documents, in a form that does not disclose confidential information.

Footnote 1: "Although neither the object nor the effect of this Regulation is to amend national legislation on access to documents, it is obvious that in accordance with the principle of loyalty governing relations between the Community institutions and the Member States, the latter will take care not to undermine application of this Regulation."

Footnote 2: Case T-309/97, Bavarian Lager v Commission, judgement of 14 October 1999, paragraph 41: "However, contrary to the Commission's assertions, it does not follow from the case-law, in particular the WWF judgement, that all documents linked to infringement procedures are covered by the exception relating to protection of the public interest. […]")

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